Les recours contre les mesures de reconduite à la frontière

L’étranger peut contester une décision de reconduite à la frontière (article 23 de la loi n° 02-031) en adressant un recours contre cette décision au président du tribunal administratif « statuant en sa qualité de juge des référés » dans un délai de 48 heures à compter de sa notification, c’est à dire jusqu’au surlendemain à la même heure : par exemple, si la décision lui est notifiée le 6 avril à 12h24, sa requête doit être enregistrée au greffe du tribunal avant le 8 avril à 12h24.

Le président du tribunal administratif ou son délégué (c’est à dire un membre du tribunal qu’il aura désigné à sa place) doit statuer dans un délai de 4 jours francs, c’est à dire sans compter le jour d’enregistrement de la requête : par exemple, si la requête est enregistrée le 8 avril, il doit statuer le 12 avril au plus tard.

L’administration n’a d’ailleurs pas le droit de mettre la décision de reconduite à la frontière à exécution avant l’expiration de ce délai de 48 heures ou, si l’étranger a saisi le président du tribunal administratif, avant que celui-ci n’ait statué (article 24 de la loi).

Avant l’audience, l’étranger peut demander au juge de lui fournir un interprète s’il ne maîtrise pas suffisamment la langue arabe, un avocat s’il n’en a pas, et de lui communiquer le dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision attaquée a été prise.

Si le juge annule la décision (article 24 de la loi), l’administration doit délivrer à l’étranger une autorisation provisoire de séjour, réexaminer sa situation et décider si elle lui délivre ou non un titre de séjour, qu’il en ait fait la demande ou non.

Si le juge rejette le recours, l’étranger peut contester sa décision en faisant appel devant la chambre administrative de la Cour de cassation dans un délai d’un mois à compter de la date de notification cette décision, mais ce recours n’est pas suspensif, c’est à dire que l’administration peut exécuter la mesure et donc renvoyer l’étranger sans attendre la décision de la Cour.

L’étranger peut également contester la décision, distincte, fixant le pays de renvoi et la décision éventuelle d’interdiction du territoire qui accompagnent la décision de reconduite, mais ces recours ne sont pas suspensifs si la décision de reconduite elle-même n’est pas contesté (article 30). Il est donc conseillé de contester toutes les décisions par un même recours.

EN PRATIQUE

L’administration refoule les étrangers sans leur permettre de faire un recours pour contester la décision. En l’absence de toute notification, ce recours pourrait être introduit sans limitation de délai, même après l’exécution de la décision. Mais, outre que ce recours n’a alors plus aucun intérêt pratique pour l’intéressé, le juge administratif se réfugie généralement derrière un formalisme excessif pour le rejeter sans l’examiner au fond2.

Notes

1 – Loi n° 02-03 relative à l’entrée et au séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration irrégulières, promulguée par le dahir n° 1-03-196 du 11 novembre 2003, publiée en arabe au Bulletin officiel n° 5160 du 13 novembre 2003 et en français au Bulletin officiel n° 5162 du 20 novembre 2003

2 – Par exemple en se déclarant incompétent aux motifs que la décision a été prise par le procureur du Roi, autorité judiciaire dont il n’est pas compétent pour juger les décisions, ou que le recours n’est pas porté devant le président du tribunal administratif « en sa qualité de juge des référés » quand bien même la requête était adressée au président du tribunal administratif « en application de l’article 20 de la loi 02-03 » qui le vise pourtant explicitement en cette qualité et fonde justement sa compétence.