Un étranger peut se trouver en situation irrégulière sur le territoire marocain pour différentes raisons :
- Entrée irrégulière sur le territoire marocain et non régularisation de sa situation administrative.
ATTENTION
L’entrée irrégulière sur le territoire marocain limite drastiquement les possibilités de régularisation et ce quel que soit la situation personnelle, familiale et sociale de l’étranger (Cf. Conditions communes pour la délivrance d’un titre de séjour).
- Entrée régulière mais visa annulé avant sa date prévue d’expiration, en application de l’article 40 de la loi n° 02-03 ;
- Entrée régulière sur le territoire marocain et dépassement de la durée du visa ou du délai de 90 jours pour les ressortissants de pays dispensés de visa, sans l’accomplissement des démarches de régularisation ;
- Entrée régulière sur le territoire mais refus de délivrance du titre de séjour;
- Entrée régulière et séjour régulier mais refus de renouvellement du titre de séjour;
- Entrée régulière ou irrégulière sur le territoire marocain et obtention du statut de réfugié du HCR au Maroc qui ne donne pas accès à un titre de séjour (cf. supra et Asile).
La loi n° 02-031 fait de la situation administrative irrégulière un délit passible de poursuites pénales. Les peines encourues diffèrent selon la raison de l’irrégularité de la situation :
- l’étranger qui s’est maintenu sur le territoire marocain au-delà de la durée de son visa peut être condamné à une amende de 2000 à 20 000 dirhams et/ou à un à six mois de prison, « sauf cas de force majeure ou excuses reconnues valables » (article 42 de la loi) ;
- l’étranger qui réside au Maroc sans être titulaire de la carte d’immatriculation ou de la carte de résidence peut être condamné à une amende de 5000 à 30 000 dirhams et/ou à un mois à un an de prison (article 43 de la loi) ;
La définition de ces deux premières infractions n’est pas très précise et est source de confusion. On ne saisit pas vraiment la différence de situation entre ces deux premiers cas, sauf pour les étrangers dispensés de visa qui n’entrent pas dans le premier. On peut faire l’hypothèse que la première infraction ne vise que les étrangers qui se sont maintenus sur le territoire au-delà de la durée de validité de leur visa mais moins de trois mois. Au-delà, l’infraction est plus grave et ils passent dans le deuxième cas qui prévoit des sanctions plus lourdes et ne prévoit pas l’exception pour force majeure ou excuses reconnues valables, notion qui n’est par ailleurs pas définie par la loi. On peut aussi faire l’hypothèse d’une appréciation de la notion de « résidence » au Maroc. Dans le 1er cas, la personne est restée plus longtemps que prévue mais sans intention de s’y installer.
- l’étranger dont la carte d’immatriculation ou la carte de résidence est arrivée à expiration et qui n’a pas formulé, dans les délais légaux (soit quinze jours après l’expiration du titre), une demande de renouvellement, peut être condamné à une amende de 3000 à 10 000 dirhams et/ou à un à six mois de prison, « sauf cas de force majeure ou d’excuses reconnues valables » (article 44 de la loi).
Dans tous les cas, les étrangers en situation de récidive risquent une condamnation deux fois plus lourde. Est en état de récidive la personne définitivement condamnée pour des actes similaires dans les cinq années qui précèdent leur commission (article 49 de la loi).
Tableau récapitulatif des principales sanctions pénales liées au séjour irrégulier | ||
Article | Délit | Sanction |
Article 42 | l’étranger qui s’est maintenu sur le territoire marocain au-delà de la durée de son visa « sauf cas de force majeure ou excuses reconnues valables » | amende de 2 000 à 20 000 dirhams et emprisonnement de un mois à six mois, ou l’une de ces deux peines seulement (le double en cas de récidive) |
Article 43 | l’étranger qui réside au Maroc sans être titulaire de la carte d’immatriculation ou de la carte de résidence | amende de 5 000 à 30 000 dirhams et emprisonnement de un mois à un an, ou l’une de ces deux peines seulement (le double en cas de récidive) |
Article 44 | l’étranger dont la carte d’immatriculation ou la carte de résidence est arrivée à expiration et qui n’a pas formulé, dans les délais prescrits par la loi, une demande de renouvellement, « sauf cas de force majeure ou excuses reconnues valables » | amende de 3 000 à 10 000 dirhams et emprisonnement de un mois à six mois, ou l’une de ces deux peines seulement (le double en cas de récidive) |
Quand un étranger en situation irrégulière est contrôlé par la police, il peut donc être déféré (présenté) au procureur du Roi qui décidera de le poursuivre devant le tribunal ou non.
Souvent, les poursuites pénales sont combinées avec l’application d’une mesure d’éloignement du territoire (cf. La reconduite à la frontière).
EN PRATIQUE
Soit l’étranger est reconduit à la frontière sans être poursuivi devant le tribunal voire même sans être présenté au procureur, soit il est poursuivi mais éloigné avant d’être jugé et condamné en son absence, soit il est jugé et condamné avant d’être reconduit à la frontière (ce qui cependant ne garantit pas qu’il soit effectivement présenté à l’audience où il est jugé).
Concernant les étrangers inculpés et jugés uniquement pour séjour irrégulier, les peines constatées varient généralement de un à six mois de prison avec sursis et de 300 à 1 000 dirhams d’amende.
Enfin, l’article 50 de la loi 02-03 a créé un délit d’émigration et d’immigration irrégulière (qui vise aussi bien les nationaux que les étrangers), passible d’une amende de 3 000 à 10 000 dirhams et/ou d’une peine de un à six mois de prison. L’immigration irrégulière consiste à entrer au Maroc en dehors des postes-frontières officiels. L’émigration irrégulière consiste elle, non seulement à sortir du territoire en dehors des postes frontières officiels, mais également à présenter aux postes frontières des documents falsifiés ou usurpés. Ce dernier délit, instauré sous la pression des pays européens, vise à dissuader aussi bien les Marocains que les étrangers de passer en Europe depuis le Maroc (Les sanctions pénales pour émigration irrégulière).
Mais avant tout, le fait de ne pas détenir un document attestant de la régularité du séjour (titre de séjour) ou de l’entrée régulière sur le territoire marocain entrave l’accès à certains droits en lien avec la situation familiale ou professionnelle. Ainsi :
- Pour qu’un(e) étranger(e) puisse se marier avec un(e) marocain(e), il lui est demandé un passeport avec tampon d’entrée et/ou un titre de séjour. Il/elle doit de plus obtenir une autorisation de mariage de la part du procureur qui se base notamment sur la régularité de son séjour et de son entrée sur le territoire marocain.
- Contrairement aux engagements internationaux du Maroc, l’enseignement fondamental obligatoire n’est prévu dans la loi marocaine que pour les enfants marocains. De plus, alors que seul un document attestant de l’identité et de l’âge de l’enfant est normalement requis pour son inscription, l’administration exige la production d’autres documents impossibles à fournir pour certains étrangers, particulièrement quand ils sont en situation administrative irrégulière, si bien que leurs enfants n’ont pas accès à l’éducation.
- Alors que des démarches telles que le dépôt de plainte ou la déclaration de perte ou de vol, devraient être accessibles à tous indépendamment de la situation administrative, les forces de l’ordre menacent souvent arbitrairement de refoulement les étrangers en situation irrégulière souhaitant porter plainte ou déclarer une perte ou un vol parce qu’ayant été victime d’agression, de vol, etc.
- Malgré l’adhésion du Maroc à différentes normes internationales relatives à la protection des travailleurs migrants, les travailleurs migrants en situation administrative irrégulière ne peuvent que très difficilement avoir accès à réparation lorsqu’ils ont été victimes d’exploitation au travail ou d’accident du travail (Travail).
Notes
1 – Loi n° 02-03 relative à l’entrée et au séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration irrégulières, promulguée par le dahir n° 1-03-196 du 11 novembre 2003, publiée en arabe au Bulletin officiel n° 5160 du 13 novembre 2003 et en français au Bulletin officiel n° 5162 du 20 novembre 2003